Le 5 juin dernier, le cabinet PCS Avocat a été invité au sein des locaux de la société Wanadev afin d’échanger avec plusieurs professionnels du secteur sur les enjeux liés à l’utilisation de systèmes d’intelligence artificielle par des professionnels du secteur vidéoludique.
Etaient présents pour échanger sur ces sujets Samuel Patou, directeur de projet informatique notamment en matière d’IA au sein du groupe Adeo, Nicolas Nguyen, fondateur de Semji, solution d’IA permettant de produire et optimiser les contenus web, Come de Percin, fondateur de Wanadev et Alexandre Daubois, lead développer.
De nombreuses questions de professionnels ont porté sur les incidences juridiques de l’utilisation de ces outils. PCS Avocat est déjà intervenu à l’occasion d’une formation dédiée aux agences de conseil en marketing et communication sur le thème de l’intelligence artificielle et la propriété intellectuelle.
Le temps d’échanges ultérieurs a permis la rencontre des différents professionnels du secteur partageant leurs expériences et interrogations Quant aux différents aspects techniques et juridique lié à l’intelligence artificielle.
Cet événement fut également l’occasion de pouvoir découvrir le dernier titre de jeux vidéo proposés par la société Wanadev : « Vestiges : Fallen Tribes ».
Retrouvez en ligne l’intégralité du Meetup.
Droit des jeux vidéo : intelligence artificielle
Juridiquement, la notion d’intelligence artificielle et les outils le mettant en place ne bénéficie pas d’une définition claire et homogène. De fait, les distinctions entre intelligence artificielle algorithmiques d’un côté et machines de deep learning de l’autre complexifient grandement la qualification des systèmes d’IA et leurs régimes respectivement applicables.
Comme souvent, les nouvelles technologies se développent plus vite que le cadre réglementaire adéquat pour ces dernières. C’est dans une logique de co-régulation que l’ensemble des acteurs participe à la mise en place de bonnes pratiques et la protection des utilisateurs.
Utilisation de l’intelligence artificielle par les studios de jeu vidéo
L’industrie du jeu vidéo a rapidement tirer profit de l’utilisation de systèmes d’intelligence artificielle dans des domaines variés :
- Compte tenu des coûts de développement des titres de jeux vidéo, leur durée de vie et d’utilisation par les joueurs constitue un enjeu majeur. Des algorithmes d’intelligence artificielle ont pu être développés pour étudier et influer sur le comportement des joueurs afin d’optimiser leur expérience de jeu.
- Le développement de personnages non-joueurs a également été largement favorisé des outils d’intelligence artificielle de machine learning qui ont pu proposer des personnage non-joueur plus réalistes et expressifs, favorisant à nouveau l’expérience la plus immersive du jeu vidéo.
- Plus récemment, plusieurs studios de jeux vidéo ont également pu faire appel à l’IA afin de générer plus rapidement des contenus artistiques – codes informatiques, éléments graphiques, textes, sons, bruitages – afin d’accélérer la production des jeux vidéo.
Sorti en début d’année 2024 le jeu « PalWorld », édité par le développeur japonais Pocket Pair, a été plongé au cœur d’une polémique concernant des ressemblances considérables des contenus du jeu avec des créations de l’univers Pokémon : l’éditeur avait ainsi confessé avoir généré de nombreux personnage sur son jeu vidéo grâce à des outils d’intelligence artificielle dont on peut facilement imaginer les modèles utilisés pour son développement.
Bases de données, IA et jeux vidéo : Que peut-on utiliser et que peut-on protéger ?
La constitution de base de données servant d’entraînement pour les outils de machine learning se confronte d’une part aux règles de propriété intellectuelle associées audit base de données constituées et d’autre part à l’obtention des licences nécessaire pour une telle utilisation.
Le « data mining » a bénéficié depuis 2019 d’un régime d’exception aux droits d’auteur et producteur de bases de données permettant l’analyse massive de textes et de données, ceci est afin de favoriser l’Open data. À défaut de l’exercice d’un droit d’opposition par l’auteur, cette « fouille » de données est par principe autorisée.
Les développeurs de jeux vidéo souhaitant utiliser de tels systèmes d’intelligence artificielle doivent ainsi être vigilants sur les informations relatives aux bases de données utilisées pour l’entraînement des IA, afin de veiller ou prévenir les risques de contrefaçon, de parasitisme, de violation de secret et confidentialité.
Contentieux et licence de banques de données
Un contentieux important se développe ces dernières années sur ce sujet : l’on peut citer la récente plainte du New York Times à l’encontre Open AI et Microsoft pour violation de droit d’auteur associés à leurs contenus de presse. En matière d’image, un contentieux similaire confronte plusieurs artistes aux banques d’intelligence artificielle « Midjourney », « Stability AI » et « DeviantArt » imposant à ces derniers une procédure de divulgation de leurs bases.
Les gérants d’outils d’intelligence artificielle se confronte ainsi un litige opposant déjà les moteurs de recherche avec les groupes de presse.
Dans ce contexte, une proposition de loi américaine envisage d’imposer aux entreprises de divulguer les données d’entraînement de leur modèle d’intelligence artificielle générative s’appliquant rétroactivement à celle déjà mise à la disposition du public.
Des négociations en vue de l’octroi de licences d’utilisation sont actuellement en cours, prédisant l’avenir du fonctionnement de l’écosystème d’intelligence artificielle.
Jeux vidéo et intelligence artificielle : les pièges juridiques
La propriété des créations générées par des outils d’intelligence artificielle soulève également de nombreuses interrogations.
A priori, les créations générées par une intelligence artificielle ne serait éligible à la protection du droit d’auteur, ces dernières ne respectant pas les conditions d’originalité telles que prévues par le code de la propriété intellectuelle, aggravé par la difficulté d’identifier un auteur marquant la création par sa personnalité.
Il serait toutefois envisageable de reconnaître à l’addition à l’utilisateur d’un outil d’intelligence artificielle la qualité d’auteur dès lors qu’il arriverait à justifier l’intégralité des démarches personnelles qu’il a effectuées dans le cadre de la réalisation de l’œuvre avec l’aide d’un outil d’intelligence artificielle.
Dans le cadre de développement de jeux vidéo, de nombreux éditeurs imposent dans leur contrat des clauses stipulant explicitement l’interdiction pour les développeurs de faire appel à des outils d’intelligence artificielle. D’un point de vue probatoire, il semble très compliqué de pouvoir à ce jour rapporter la preuve de l’utilisation d’outils d’intelligence artificielle dans la production de contenu, notamment en matière de codes informatiques.
S l’on peut admettre qu’un risque juridique existe quant à une exploitation ou re-exploitation de contenus protégés par la propriété intellectuelle, seul un accès aux bases de données desdits outils permettrait de connaître avec fiabilité les œuvres protégées, potentiellement utilisées.
Intelligence artificielle et données personnelles
En matière de protection de données personnelles, la réglementation applicable (RGPD) impose à l’ensemble des professionnels collectant et traitant ces données de garantir l’information et l’exercice de droit des personnes concernées dans les conditions prévues par les textes. Pour rappel, ces derniers incluent notamment les droits d’accès, de rectification, de portabilité voire d’effacement et de suppression.
Il apporte également aux développeurs de veiller à ne collecter que les données jugées pertinentes pour le développement de leurs produits. Tenue à une obligation de sécurité à la protection des données personnelles, les studios doivent faire l’objet d’une vigilance particulière.
Enfin, une utilisation dévoyée des outils d’intelligence artificielle pouvant servir à utiliser les Deep fakes pourrait exposer les développeurs à des sanctions civiles et pénales.
Avocat – Droit des jeux vidéo
Spécialisé en droit du numérique, le cabinet PCS Avocat accompagne depuis plus de dix ans les éditeurs et studios de jeux vidéo sur l’ensemble des problématiques juridiques associées à leurs activités. Nous accompagnons et formons l’ensemble des professionnels aux nouveaux outils d’intelligence artificielle